Columbia “protège des conditions, pas des décisions à la ‘con’”
Pour l'hiver 2025, la marque américaine d'outdoor déploie une nouvelle plateforme de marque pour entrer dans une nouvelle ère tout en rendant hommage à son héritage piquant.
Interview. Dans les rues de Paris, une campagne d’affichage choc interpelle le public depuis quelques semaines : “Protéger des conditions, pas des décisions à la con”, indique le slogan. Un autre lance que “Quitte à avoir une paire de c******, autant la garder au chaud”. Imaginée par l’agence londonienne adam&eve DDB, cette prise de parole mondiale est l’œuvre de Columbia. Un ton décalé pour l’équipementier dans un univers outdoor réputé “conformiste” et “frileux” explique Romain Cancilleri-Michy, Senior Brand Marketing Manager Europe de Columbia.
En France, l’agence TBWA\Paris se charge du déploiement de la nouvelle plateforme de marque “Engineered for Whatever” de l’entreprise mettant en avant la robustesse des équipements techniques de la marque américaine “conçus pour affronter les conditions les plus imprévisibles en extérieur”, selon le dirigeant. Avec cette opération au budget record pour Columbia, la firme fondée en 1938 renoue avec un esprit irrévérencieux qui avait fait sa marque de fabrique dans les années 1980′ et 1990′.
Pourquoi avoir choisi cet angle de communication ?
Romain Cancilleri-Michy : « Nous avons imaginé une plateforme de marque et une campagne de communication en hommage à notre histoire. Avec de l’humour et de l’irrévérence. Cela permet de nous différencier des prises de parole assez homogènes des marques de notre catégorie. Cette prise de parole met aussi en avant nos produits. Elle doit répondre aux attentes. Nous essayons de redéfinir les gammes tout en maintenant la valeur des produits avec des prix plus attractifs que nos concurrents, sans délaisser la qualité. Nous misons sur la versatilité des produits pour qu’ils puissent être portés en lifestyle ou en outdoor ».
Pourquoi insister publiquement sur le coût élevé de cette campagne ?
R.C-M. : « Souvent, lorsqu’une nouvelle plateforme de marque est déployée, il y a un investissement massif sur le pack mais pas sur sa diffusion. Nous voulions vraiment que tout le monde voit ce que nous avons fait. L’activité de Columbia grossit, donc mécaniquement, nous avons davantage de moyens. C’est un signal fort envoyé à nos partenaires détaillants. Notre modèle reste du BtoB toC ».
Qu’attendez-vous que les consommateurs retiennent de Columbia ?
R.C-M. : « L’idée est de rappeler ce qu’est Columbia et ce que fait Columbia. Nous voulons affirmer notre différence et la qualité de nos produits. Notre positionnement est “Columbia c’est la bonne marque pour toi”. Nos consommateurs doivent être en adéquation avec le style et l’énergie de la marque ».
Quels sont les objectifs de Columbia ?
R.C-M. : « Columbia veut être la marque numéro Un dans le monde. Toutefois, être leader veut tout et rien dire. En Europe et en France, c’est plus compliqué d’être numéro Un : il y a Decathlon sur ces marchés. Les volumes de leur marque Quechua sont imbattables pour des marques comme Columbia. C’est aussi le cas pour Salomon ou The North Face. Cela est simplement factuel. Columbia veut être la marque la plus pertinente dans l’univers de la randonnée ».
Comment recruter de nouveaux clients dans ce marché ultra concurrentiel ?
R.C-M. : « Il y a une manière d’aborder les populations qui ne sont pas nées “chèvres” dans la montagne et qui se disent que l’outdoor n’est pas fait pour eux. Nous voulons être là pour les accompagner et leur dire que Columbia est la marque indispensable pour débuter et appréhender l’outdoor. Je fais un parallèle avec Inoxtag qui a réussi à transmettre ce message grâce à son documentaire Kaizen. On ne communique plus comme il y a vingt ans : il faut s’adapter pour transmettre les codes ».
Romain Cancilleri-Michy, Senior Brand Marketing Manager Europe de Columbia.
Columbia a-t-il vocation à faire du sponsoring sportif ?
R.C-M. : « La marque l’a déjà fait. Columbia a été partenaire principal de l’UTMB pendant 7 ans. En 2025, ce n’est plus trop d’actualité du coup le focus a plutôt été donné sur la randonnée. Ce n’est pas un sport de compétition. Nous optons davantage pour des activations et les bons profils d’ambassadeurs. Ce ne sont pas forcément des athlètes de haut niveaux mais des personnalités capables de transmettre des émotions et des valeurs. Il y a vraiment une dimension sociale et culturelle dans nos choix. Columbia a identifié des opportunités de développement qui ne sont pas toujours liées à la performance sportive ».
Dans cette stratégie, comment Columbia conjugue développement et durabilité ?
R.C-M. : « Columbia, c’est comme un très gros bateau. La marque est née il y a longtemps, donc il est difficile de modifier rapidement les process. En tout cas, c’est plus difficile que pour une marque née hier qui aurait la volonté de produire en circuit court. Pour autant, sur plusieurs plans, nous avons devancé la réglementation en matière de protection de l’environnement. Columbia est une marque outdoor, donc nous dépendons du climat. Columbia a signé un partenariat avec Protect Our Winter (PWO). Une partie de nos investissements viennent en aide à des associations sur le sujet. Effectivement, nous avons une activité commerciale, mais nous œuvrons aussi pour l’outdoor ».
Quel rôle pourraient jouer les Jeux des Alpes 2030 sur l’activité française de Columbia ?
R.C-M. : « Je pense que si le Comité d’organisation (COJO) des Alpes Françaises 2030 fait aussi bien que Paris 2024, cela va donner une envie de neige. C’est une certitude. Tout ce qui met en scène l’outdoor nous est favorable. Pas seulement à Columbia d’ailleurs, mais à l’ensemble de la société. Les Jeux rappellent l’importance de la mobilité, donnent l’envie de bouger et de pratiquer une activité physique. Je suis curieux aussi de voir les nouvelles disciplines qui seront aux Jeux. Peut-être qu’une nouvelle génération de fans va émerger et donc de nouveaux consommateurs. Je finirai par rappeler que l’outdoor ne décline pas. Au contraire, il y a toujours autant de monde sur les chemins de randonnées, et avec des profils très différents ».