16 septembre 2025

Temps de lecture : 2 min

Proposition d’une « loi Evin » pour les paris sportifs

Dopé par des investissements publicitaires record, le marché des paris sportifs explose en France. Mais derrière l’euphorie économique, un rapport alerte sur les dérives marketing, la vulnérabilité des jeunes et la nécessité d’un encadrement à la hauteur des enjeux sanitaires.

Etude. Les images de l’humoriste Redouane Bougheraba courant en petite tenue sont devenues virales. La séquence vidéo, imaginée par l’opérateur de paris sportifs Betclic et l’agence Buzzman, résulte d’une promesse de l’artiste marseillais : « Si Paris est sacré Champion d’Europe, je défile en petite tenue sur les Champs-Élysées. » Ce seront finalement les champs… d’Alizay, petite commune de l’Eure. Cette campagne lancée le 12 septembre 2025 met en avant « l’audace et le fait d’assumer jusqu’au bout, » mais, surtout, illustre l’explosion de la communication des opérateurs de paris sportifs sur un marché en pleine forme.

En cinq ans, le volume des mises sur les paris sportifs a été multiplié par 2,8, et le produit brut des jeux, soit ce qui est gagné par les opérateurs, est monté à 1,8 milliard d’euros en 2024. C’est 19% de mieux en un an. Le secteur est devenu la deuxième forme de jeux d’argent la plus répandue en France, derrière la loterie. L’an passé, les paris sportifs ont été portés par de grandes compétitions sportives, comme l’Euro masculin de football et les Jeux de Paris. Elles ont concentré près d’un tiers des 670 millions d’euros investis en publicité en 2024.

Quand l’addiction alimente le business

Les publicités pour les paris sportifs sont devenues omniprésentes. Elles s’affichent dans les métros, s’invitent sur les réseaux sociaux, s’intercalent entre deux programmes télévisés et s’ancrent jusque dans les stades par le biais du sponsoring. Une exmarqposition massive qui inquiète Addictions France. L’association a publié mardi 16 septembre 2025 un rapport alarmant sur les effets de ce marketing sur les comportements des jeunes joueurs.

Selon le document, « Carton rouge : le marketing agressif des paris sportifs« , les chiffres confirment l’ampleur du phénomène : près d’un Français sur deux a vu des publicités pour les paris sportifs à l’été 2024, un taux qui grimpe à 75% chez les joueurs. L’association rappelle que 63% du produit brut des jeux provient de joueurs en situation d’addiction ou de perte de contrôle. Une manne financière qui incite l’industrie à cibler les plus vulnérables, malgré les risques connus, à coups de slogans accrocheurs, utilisation de personnalités ou codes promo.

Les jeunes seraient particulièrement vulnérables aux messages des opérateurs de paris sportifs : 35% des 15-17 ans confient avoir déjà joué à des jeux d’argent, et 28% ont misé sur des paris sportifs, malgré l’interdit légal. Dans les cas les plus graves, les conséquences vont de l’endettement aux troubles psychologiques sévères, jusqu’aux comportements délictueux, rappelle l’association.

Le sponsoring menacé

Face à ce constat, Addictions France juge le cadre réglementaire actuel « trop permissif ».L’association propose un changement de paradigme inspiré de la loi Évin, qui depuis 1991 encadre la publicité pour l’alcool. Concrètement, elle recommande d’interdire les publicités sur les réseaux sociaux, de bannir les gratifications financières et de proscrire l’usage de personnalités sportives ou culturelles dans les campagnes. Toute communication devrait se limiter à des références objectives et informatives, à l’image de ce qui est imposé aux producteurs d’alcool.

Addictions France rappelle que plusieurs pays ont déjà franchi le pas. L’Italie a interdit toute publicité et sponsoring sportif liés aux jeux d’argent dès 2018. La Belgique a restreint fortement les pratiques marketing depuis 2023 et l’Australie prévoit de bannir le parrainage d’ici 2027. Pour l’association, la France doit désormais suivre cette voie pour protéger les jeunes générations.

Cette possible décision législative aurait des conséquences sur le modèle économique du secteur et sur les investissements en sponsoring sportif. Les opérateurs de paris sportifs ont en effet multiplié les partenariats avec les clubs et fédérations ces dernières années. Lundi 15 septembre 2025, Parions Sport a, par exemple, prolongé son contrat de sponsoring avec le Paris Saint-Germain jusqu’en 2028. Contactés les différents opérateurs de paris sportifs n’ont pas souhaité répondre à nos sollicitations.

© SportBusiness.Club – septembre 2025

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