Interview. La fatigue se lit clairement sur le visage d’Amélie Oudéa-Castéra. Le résultat d’une quinzaine durant laquelle la ministre des Sports n’a pas compté son temps ni ses déplacements sur les sites de compétition des Jeux olympiques de Paris 2024. Ce dimanche 11 août c’est la dernière journée de ces Jeux, et sans doute la dernière ligne droite pour la ministre au sein d’un gouvernement démissionnaire.
Pour Amélie Oudéa-Castéra, le mandat se termine sur une note positive. Pour la délégation française, l’objectif initial du top 5 au classement des médailles a été atteint. Quelques heures avant la cérémonie de clôture des Jeux olympiques, la ministre a tiré un bilan de ces dix-sept jours de fête olympique, tout en se projetant sur l’avenir et l’impact sur la population de l’événement.
Que faire pour que la France reste dans le top 5 de manière pérenne ?
Amélie Oudéa-Castéra : « Nous allons tirer toutes les leçons de cette édition des Jeux, et allons continuer à investir et à consacrer des moyens importants aux services d’objectifs précis sur lesquels nous demandons aux acteurs d’être responsables, de rendre des comptes et d’avoir de la transparence ainsi que des résultats. Ce qui a très bien marché est l’accompagnement sportif autour des athlètes, mais aussi les aides matérielles pour la vie de famille, la gestion de la maternité ou la conciliation entre des études, une carrière de sportif et la reconversion, en partenariat avec les entreprises et les services publics. Cette sérénité a été le complément indispensable des conditions de la performance. »
Certaines fédérations ont-elles ratées leurs Jeux olympiques selon vous ?
A. OC : « On ne peut pas parler de rater, car ces Jeux sont une réussite collective. Toutes les fédérations se sont préparées avec le plus grand sérieux. Il y a eu beaucoup de bonnes énergies dans le sport français et il n’y a pas eu de voix dissonante, de polémique, de difficultés ou de tiraillement. Quand il y a eu des déceptions, personne ne s’est rejeté la faute. Nous ferons un bilan avec un audit approfondi, à la fois de la performance française mais aussi de la performance des nations concurrentes, car elle recèle également des enseignements utiles pour nous, pour la suite. Certaines disciplines ont excellé, d’autres, ont eu plus de difficultés comme l’aviron, la gymnastique ou le tennis. Et parfois, il n’y a pas eu de médailles, comme en badminton, mais le bilan est très bon et très encourageant pour la suite. »
Vous en avez profité pour voir vos homologues européens et internationaux. Qu’ont-ils pensé de ces Jeux ?
A. OC : « Ils ont été exceptionnels. Ça a été dit sur des plateaux de médias anglo-saxons et les retours sont unanimes : ces Jeux sont les plus spectaculaires de tous les temps. J’ai reçu énormément de messages de mes homologues ministres des Sports que j’avais réunis dans un moment de partage et de diplomatie. Ils sont frappés par ce que la France a été capable de faire. Ils savent que la barre est haute pour les prochaines éditions. La France a surpris le monde, mais elle s’est surprise elle-même aussi. Il faut que cela se poursuive dans d’autres domaines. Nous avons vu une grande France s’exprimer sur le champ sportif, artistique et des émotions partageables. Le France est un grand pays et il faut que nous ayons un regain de confiance, sur notre capacité à faire de grandes choses. »
Quel impact attendez-vous de ces Jeux sur les clubs et les fédérations ?
A. OC : « C’est une question majeure et nous l’avons anticipé avec la formalisation de notre stratégie d’héritage, des investissements dans les équipements sportifs et dans les aides financières pour les familles modestes afin qu’elles puissent payer une licence dans un club. Il y a également le développement du sport à l’école et du sport-étude. Nous avons pris l’engagement de les multiplier par trois afin que nos hauts potentiels puissent continuer à se former. Nous avons énormément accéléré sur le champ des aménagements universitaires pour permettre à nos étudiants de mieux concilier l’excellence académique et l’excellence sportive. Enfin, nous avons déployé des maisons sport santé dans tous les territoires pour faire en sorte que les personnes âgées, les personnes en situation de handicap et les personnes éloignées de la pratique, qui sont parfois malades ou en affection de longue durée puissent être aidées dans leur pratique. Je n’oublie pas, non plus, la pratique libre qui va se déployer, nous l’avons vu cette nuit avec le Marathon pour tous. C’était le pari de ces Jeux olympiques : qu’ils marquent un tournant dans la place du sport en France. Nous y sommes. »
Combien de licenciés supplémentaires attendez-vous à la rentrée dans les clubs ?
A. OC : « Depuis 2017, nous avons 3,5 millions de pratiquants réguliers supplémentaires. Nous avons comme objectif qu’il y ait la même chose au lendemain des Jeux : entre 3 et 3,5 millions, dont 2 à 2,5 millions de pratiquants licenciés dans nos clubs. »
Propos recueillis par Killian Tanguy
© SportBusiness.Club Août 2024