Des Jeux d’été déplacés à l’automne ? Des athlètes “augmentés” grâce à l’intelligence artificielle ? Des Jeux de l’e-sport ? Tous ces scénarios paraissent plausibles au patron du Comité international olympique (CIO), Thomas Bach, tant environnement et technologies façonnent aussi le sport mondial. « Jamais nous n’avons rencontré autant d’intérêt pour accueillir les Jeux avec douze, parfois seize ans d’avance», s’est réjoui le patron de l’olympisme dans un entretien à l’AFP.
Avec les Jeux olympiques d’hiver 2026 confiés à Milan-Cortina (Italie), ceux d’été de 2032 à Brisbane (Australie), tandis que les éditions d’hiver de 2030 et 2034 seront très certainement attribuées en juillet 2024 aux Alpes françaises et à Salt Lake City (Etats-Unis), l’instance sportive installée à Lausanne (Suisse) a assuré l’avenir du plus grand événement sportif au monde pour dix ans, et uniquement dans des pays occidentaux.
Mais après ? Déjà, les pays candidats ont remplacé les campagnes publiques par un “dialogue” confidentiel avec le CIO, « mais nous avons déjà un nombre à deux chiffres de villes et régions intéressées pour 2036 et 2040,» a assuré le dirigeant allemand. Thomas Bach n’a pas voulu commenter les ambitions des puissances sportives du Golfe. D’une part l’Arabie Saoudite, seule candidate à l’organisation de la Coupe du monde masculine de football 2034. D’autre part, le Qatar, de son côté furieux de l’attribution à ses dépens des Jeux de 2032 à Brisbane. L’Etat prépare une candidature pour ceux de 2036, a rapporté samedi 27 avril 2024 le journal qatari Al-Watan.
Des Jeux d’été à l’automne
Thomas Bach estime que le CIO a enrayé la crise des candidatures grâce aux réformes de son “Agenda 2020”, adopté dans une première version en 2014. Ce cahier des charges vise à réduire les coûts et à améliorer l’impact des Jeux en privilégiant le réemploi d’installations existantes et en plafonnant à environ 10 500 le nombre d’athlètes pour les éditions estivales. En contenant la croissance de son événement phare, le CIO opte pour une stratégie inverse de celle de la Fifa. La fédération internationale de football va transformer son Mondial masculin en un méga-tournoi à 48 équipes dès l’édition 2026 aux États-Unis, au Mexique et au Canada. Pour 2030, la Coupe du monde se répartira dans six pays et trois continents.
Reste que le réchauffement climatique contraint l’instance olympique encore plus que son homologue du football : seuls dix pays seraient encore en mesure d’accueillir les Jeux d’hiver d’ici 2040, a rappelé Thomas Bach. Une observation qui pourrait pousser le CIO à envisager “une rotation” entre quelques sites hôtes. Les fortes chaleurs peuvent aussi perturber les Jeux d’été et devraient à terme faire évoluer “l’ensemble du calendrier international” sportif, prédit le patron de l’olympisme.
Le côté obscur de l’IA
« Vous verrez l’importance croissante de l’hémisphère sud [où les Jeux d’été tombent pendant l’hiver austral] et de la partie orientale du monde,» anticipe le dirigeant. Celui-ci imagine aussi des Jeux pouvant être déplacés “à l’automne”… comme l’avait été le Mondial 2022 de football au Qatar disputé en décembre et non au début de l’été comme cela l’était traditionnellement.
Mais organiser les Jeux olympiques n’est pas le seul défi pour le CIO. L’instance s’est imposée comme le régulateur en chef du monde sportif, finançant largement la lutte antidopage et les fédérations internationales tout en édictant des recommandations éthiques ou médicales. Pour Thomas Bach, c’est désormais de l’intelligence artificielle (IA) que les instances doivent s’emparer, parce qu’elle « va déterminer l’avenir de nos sociétés et grandement influencer le sport dans de nombreux aspects ». L’Agenda IA, lancé la semaine dernière par l’organisation prévoit d’aider à “identifier les talents” et à “réduire le fossé entre les athlètes qui ont à leur disposition” les meilleurs programmes d’entraînement, de nutrition et de suivi médical, avec de puissants sponsors, et les autres, explique l’Allemand de 70 ans.
L’intelligence artificielle peut également avoir une face plus sombre: « je ne suis pas prophète mais quand on regarde la combinaison de l’IA et de la biochimie, on peut arriver à une conclusion plutôt dystopique sur ce que (…) ces deux développements scientifiques peuvent permettre pour améliorer la performance,» a-t-il averti. Pour Thomas Bach, il n’est pas question en revanche de mêler l’e-sport [qui a vécu sa première “semaine olympique” à Singapour en juin 2023] aux sports traditionnels : « je ne pense pas que vous verrez d’épreuve d’e-sport aux Jeux olympiques, mais vous verrez peut-être très bientôt des Jeux de l’e-sport,» a-t-il annoncé. (Avec AFP)
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