Interview. Les deux équipes de France qualifiées pour les Jeux olympiques de Paris 2024 et des matchs sur le mythique et historique stade Yves-du-Manoir… le hockey bénéficiera d’une visibilité exceptionnelle cet été. L’année 2024 sera très importante pour la fédération française qui d’ailleurs s’installera dans le stade de Colombes après les Jeux. La présidente de la Fédération, Isabelle Jouin, est prête à affronter ces nombreux défis. De passage au Club France, où ont été présentées les équipes de France mardi 23 juillet 2024, elle détaille sa stratégie à SportBusiness.Club.
L’équipe féminine disputera les Jeux olympiques pour la première fois. L’équipe masculine revient 52 ans après leur dernière participation (Munich 1972). Que cela représente-t-il pour votre fédération ?
Isabelle Jouin : « Le hockey féminin est un axe de développement fort de notre fédération. Au niveau mondial, le hockey est un sport paritaire, avec 30 millions de joueurs et de joueuses. En France, nous avons du retard avec un taux de féminisation de 28%. Nous l’avons amélioré mais nous avons besoin d’avoir plus de joueuses, ainsi que des femmes qui voudront s’investir dans des clubs, dans la gouvernance de la fédération, pour être arbitre, juge ou encore déléguée technique. Nous avons vraiment besoin de féminiser toute notre filière et nos joueuses de l’équipe de France sont nos ambassadrices. »
Qu’avez-vous mis en place pour cela ?
I. J. : « Nous essayons de leur mettre à disposition tous les moyens possibles : qu’elles aient le même nombre de jours de stage, des pôles élite avec les mêmes hébergements, transports, équipements… Ce sont des choses qu’elles n’avaient pas lorsque nous sommes arrivés en 2021. Les équipes masculine et féminine se préparent maintenant de la même manière, en tenant compte de leur spécificité évidemment. »
Que représente le fait de jouer dans le Stade Yves-du-Manoir ?
I. J. : « Je trouve incroyable d’être le seul sport à disputer ses compétitions sur un site olympique qui a connu deux Jeux olympiades, avec 100 ans d’écart. C’est plein d’émotions, mais aussi une opportunité pour notre sport d’être plus médiatisé. Le monde parlera du hockey sur gazon au travers de ce site. »
Comment comptez-vous profiter des Jeux olympiques pour augmenter votre nombre de licenciés et féminiser la pratique ?
I. J. : « Nous l’avons préparé au travers d’un plan d’action qui s’appelle « Ouvrant grand les clubs ». Nous l’avons coconstruit lors de l’Assemblée générale en mai 2024. Nous avons travaillé avec nos clubs pour savoir comment accueillir de nouveaux pratiquants, leur parcours d’intégration et les services que nous pouvons proposer. Mais nous avons aussi refléchi sur comment accueillir de nouveaux bénévoles, car sans eux, la vie associative ne fonctionne pas. Enfin, nous avons aussi créé une carte interactive où il est possible de retrouver tous nos clubs avec les contacts. Nous avons présenté ce plan au ministère des Sports, car c’était une demande de sa part. »
Avez-vous fait des prédictions sur le nombre de licenciés supplémentaires que le hockey pourrait recevoir ?
I. J. : « C’est compliqué à faire car cela dépend du contexte. La rentrée scolaire est très importante, mais nous avons travaillé sur deux temps. La rentrée scolaire, mais aussi en novembre. Historiquement, nous avons constaté que dans d’autres sports, certains jeunes se sont inscrits dans un club en septembre, mais ont envie de changer. Et ce changement se fait souvent pendant la période de la Toussaint. Nous avons donc mis en place des licences découvertes gratuites afin d’être présent et proposer une offre à ce moment. »
La fédération va maintenant avoir ses locaux au stade Yves-du-Manoir. Qu’est-ce que cela va vous apporter ?
I. J. : « Au niveau des partenariats, c’est un travail qui est mené depuis 4 ans. Nous avons augmenté le nombre de partenaires et avons changé de stratégie. Nous partions d’un principe où nous n’avions pas de titre sportif emblématique. Les jeunes commencent à performer, mais ce n’est pas encore suffisant pour aller chercher de gros partenaires. Nous avons donc travaillé avec des PME, souvent des start-up qui ont besoin de visibilité et qui font des levées de fonds.
Au niveau du stade, nous avons également commencé à coconstruire les projets de demain avec le département des Hauts-de-Seine, puisque nous voulons déjà coorganiser des compétitions nationales et internationales avec des coupes d’Europe et des coupes du monde. Le site aura deux terrains : le Racing Club de France, le club héritier aura le sien et la Fédération également. Mais nous pourrons les utiliser afin d’organiser des compétitions majeures. Enfin, le dernier objectif est sociétal afin de faire vivre les quartiers qui sont autour. Nous voulons avoir un sport populaire et inclusif, et moins un sport élitiste comme il l’était historiquement. »
Entretien : Killian Tanguy
© SportBusiness.Club Juillet 2024