Présidente de l’Agence Nationale du Sport (ANS) et du Comité paralympique et sportif français (CPSF), Marie-Amélie Le Fur a confié à SportBusiness.Club ses inquiétudes face à de probables coupes budgétaires touchant le mouvement sportif français. Si tel est le cas, il faudra faire des choix, prévient-elle, alors que le nouveau plan stratégique de l’Agence doit être présenté ce lundi 6 octobre 2025.
Quelques jours plus tôt, c’est sous la casquette d’ambassadrice d’EDF que la multiple championne paralympique s’était rendue au French Riviera Open, tournoi international de tennis fauteuil organisé à Biot (Alpes-Maritimes) par Michaël Jérémiasz. L’événement a réuni une vingtaine d’élèves de l’École de la 2ᵉ chance de Nice dans le cadre du programme “Un champion dans mon école”, soutenu par EDF. Pendant près d’une heure, ces jeunes ont découvert le tennis fauteuil.
L’Agence Nationale du Sport (ANS) dont vous êtes la présidente présente son plan stratégique 202352032. Que pouvez-vous déjà dévoiler ?
Marie-Amélie Le Fur : « Yann Cucherat, le manager de la haute performance, va effectivement présenter toute la stratégie “Ambition Bleue”. Cela va nous placer dans la perspective de 2032. Avec ses équipes et l’ensemble des parties prenantes du sport, il a voulu créer une stratégie à moyen et long-terme avec l’objectif d’être en capacité d’accompagner l’élite, mais aussi afin d’aider à accompagner cette jeune génération. Plus globalement, nous devons réfléchir à ce qu’est la nouvelle vision et le nouveau projet stratégique de l’ANS au sens large ».
Quelle vision voulez-vous donner à ce plan ?
M-A. L.F. : « Il a fallu réfléchir à des éléments de rupture sur le développement de la pratique, sur les questions des équipements ou de la gouvernance territoriale. Nous avons, avec les membres de la gouvernance, les administrateurs et les membres fondateurs de l’agence, tracer une nouvelle feuille de route engageante. Celle-ci va certainement amener l’agence à pivoter, tant sur des opérations et du soutien financier que sur l’expertise, et la prospective ».
Comment ont réagi les membres de l’ANS ?
M-A. L.F. : « Ce que j’ai ressenti de la part des membres fondateurs et des administrateurs, c’est qu’il y a un profond attachement à l’agence, à son modèle, à la collégialité, également au fait d’avoir des organes de partage. Les collectivités, l’État et le mouvement sportif sont convaincus du modèle et ont envie d’en faire partie. Mais nous devons apporter un peu de fluidité dans les programmes et les projets portés par l’agence ».
Quel bilan dressez vous de votre première année de présidence à l’ANS ?
M-A. L.F. : « Elle n’a pas été facile. Nous étions dans un contexte très compliqué en raison du vote du budget en 2025 qui prévoyait des baisses. Nous avons également subi des coupes budgétaires successives. Tout cela nous a amené à devoir réorienter nos choix. Nous avons réussi à sécuriser et à tenir l’entièreté des engagements de l’année 2025 sur l’emploi, les équipements ou encore le développement de la pratique à destination des clubs et des fédérations ».
Quelles sont les perspectives pour l’année à venir ?
M-A. L.F. : « Je ne vais pas vous le cacher : je suis particulièrement inquiète pour 2026. Que sera la coupe budgétaire votée dans le cadre du projet de loi de finances (PLF). Si nous n’avons pas un budget à minima égal à celui de 2025, nous allons devoir faire des renoncements ».
Où pourriez-vous couper ?
M-A. L.F. : « Ces renoncements pourraient toucher soit le développement du sport, soit la question des équipements, soit celle de l’emploi ou du financement des associations. Personnellement, je n’ai pas envie de ça, car ce sont des piliers essentiels et complémentaires. L’heure doit être à la mobilisation. Nous savons tous qu’un euro investi dans le sport, c’est treize euros économisés dans les finances publiques. Il est temps que les décideurs politiques l’entendent, notamment au niveau du gouvernement et de Bercy. »
Vous êtes au French Riviera Open en tant qu’ambassadrice d’EDF qui a lancé un programme baptisé “Un champion dans mon école”. Où en est ce programme ?
M-A. L.F. : « Il se porte bien. C’est un programme qui est essentiel. Il donne la parole aux grands champions paralympiques qui se confient sur leur quotidien devant les élèves. Ils viennent parler de leur handicap dans les écoles. C’est un dispositif dont je suis fière car ce type de rencontres est précieux ».
Est-ce une des réussites des Jeux de Paris ?
M-A. L. F. : « Ce programme a été lancé avant Paris 2024. C’est un dispositif de longue date porté par EDF [depuis 2016] qui a évolué au fil du temps. C’est vrai que l’année dernière, grâce aux Jeux, ce programme a connu une impulsion nouvelle en se tournant aussi vers l’enseignement supérieur et les grandes écoles. C’est un programme qui a su évoluer avec le temps pour toujours garder sa cohérence et sa pertinence ».
Au CPSF, dont vous êtes aussi présidente, un des programme phare est le “Club Inclusif”. Comment se porte-t-il ?
M-A. L.F. : « Ce programme fêtera bientôt ses trois ans [il a été lancé en décembre 2022]. Aujourd’hui, nous approchons des 3 000 avec le label “Club inclusif”. Depuis juin dernier nous menons une étude auprès des différentes parties prenantes car nous envisageons porter un nouveau projet de Club Inclusif. Il évoluera et tiendra compte de cette première expérience. Nous souhaitons l’inscrire dans la durée. Des annonces serons faîtes bientôt ».
Entretien : Killian Tanguy, correspondant à Nice (Alpes-Maritimes)
© SportBusiness.Club – Octobre 2025