Casquette vissée sur le crâne et petits yeux trahissant une nuit trop courte, Thierry Reboul arbore le léger sourire de celui qui vient de réussir un joli coup. Au lendemain de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024, le patron des événements du Comité d’organisation a peu dormi. Il se délecte des messages de félicitation venant du monde entier. Son événement, sur lequel il travaille depuis 2018 et son arrivée auprès de Tony Estanguet, le président des Jeux, a été un réel succès.
Le pari était loin d’être gagné : cette cérémonie d’ouverture sur la Seine, la première des Jeux se tenant en dehors d’un stade, a été un immense défi. « J’ai la satisfaction du devoir accompli,» a-t-il déclaré lors d’un point presse samedi 27 juillet 2024. « Ce fut une aventure folle, un pari fou, poursuivait-il. Je ne m’imaginais pas cette complexité. Maintenant, je suis heureux et fier d’avoir monté ça ». D’autant que la pluie s’est invitée rendant l’opération encore plus compliquée.
« Je suis devenu un expert en météo, et le matin même, je savais qu’il y avait un grand risque de pluie, a raconté Thierry Reboul. Malgré tout, on croyait pouvoir passer à côté ». Et bien non, malheureusement. L’averse redoutée a décidé de tomber sur Paris Ouest quasiment en même temps que le coup d’envoi, à 19h30. « Il a fallu s’adapter, et on a su le faire en prenant des décisions tout le temps, en accord avec les artistes et les musiciens,» a-t-il confié. Ainsi, quelques prestations, peu, ont été annulées au dernier moment bouleversant le déroulé et son minutage.
Pas question de faire prendre le moindre risque aux 2000 artistes présents. Des séquences prévues sur des toits, rendus glissants à cause de la pluie, ont été supprimées. Tout comme une autre sur un skate park flottant, pourtant très spectaculaire. « On a annulé à chaque fois pour des raisons de sécurité,» a justifié Thierry Reboul. Des décisions prises sans doute la mort dans l’âme, mais quand le monde vous regarde l’erreur est interdite.
Un futur se dessine pour Paname 24
Sur la Seine et ses berges les 9 000 personnes mobilisées pour le show ont également dû s’adapter en temps réel. Pour Paname 24*, le consortium d’agences chargé de la production, la cérémonie a été l’aboutissement d’un parcours non dénué d’embûches aussi. Matérielles, bien-sûr, mais également organisationnelles. « Il y a notamment eu le conflit avec les danseurs qui avaient déposé un préavis de grève, et qui a été réglé jeudi soir, à peine 24 heures avant la cérémonie,» confie une source impliquée dans l’événement.
Avant cela, la construction n’a pas été facile non plus, notamment avec les administrations. « Nous avions craint un blocage des ministères et étonnement ils ont tous bien joué le jeu, poursuit notre source. En fait, c’est le Comité International Olympique qui nous bloquait avec des décisions trop tardives. Leur priorité était la livraison des Jeux, et pour eux la cérémonie passait après ». Heureusement, là aussi cela s’est arrangé. Contrairement à l’inspection du travail dont les interventions ont été jugées un peu trop « pointilleuses ».
Pour les dirigeants des agences impliquées dans l’événement, le réveil ce samedi 27 juillet a aussi été agréable après la réussite logistique et technique de cette cérémonie. « Ce fut la plus longue, la plus belle et la plus vue au monde, se réjouit ce dirigeant d’agence. Ce fut aussi un chantier pharaonique dans son organisation. Nous avons montré notre savoir-faire au monde entier ». Une vitrine exceptionnelle que les enseignes françaises de l’événementiel comptent bien exploiter.
Ainsi, Paname 24, cette association montée tout spécialement pour Paris 2024, et qui réalisera aussi la cérémonie d’ouverture des Jeux paralympiques, pourrait bien survivre aux Jeux. « Ce travail nous a beaucoup rapproché, assure le dirigeant. Nous nous sommes serrés les coudes. Il y a eu beaucoup de solidarité entre nous. Cette cérémonie a montré que nous étions capables de travailler ensemble ». Une forme d’héritage des Jeux.
Bruno Fraioli
© SportBusiness.Club Juillet 2024
(*) Auditoire, Havas Events, Ubi Bene, Obo et Double 2